Rock en Seine, jour 2 : sous le signe de l'amour

Comme je l'avais mentionné dans mon compte-rendu du festival Levitation, je n'ai pas pour habitude de chroniquer des concerts. Seulement ça fait un bon souvenir des années après, alors je le fais encore une fois, rien que pour moi, égoïstement. Et si ça vous semble utile, banco !

Je n'étais pas à la première journée de Rock en Seine avec Billie Eillish, ni à la troisième aujourd'hui (dommage, mais quand y'a p'us d'place, y'a p'us d'place). La bonne surprise du parking pas cher tout vide, de l'entrée quasi-tranquille et d'une foule très relative étant passée, parlons musique.

Turnstile

Turnstile ouvre le bal avec son post-emo-core (comme Fragile en France, quelques groupes réinventent  depuis peu le hardcore basique, même celui qui était jusqu'alors juste "mélodique" pour y introduire d'autres sensibilités, héritées de multiples courants musicaux, pour créer une musique passionnément moderne qui attire des gens de tous horizons qui étaient jusqu'alors perméables à ce genre de musique). Un son millimétré, léché à outrance, et un hardcore débarrassé de tous ses clichés. Pas de look, pas d'attitude, juste une communion spirituelle. On savait, au vu des vidéos sur YouTube, que le groupe déclenchait une hystérie extatique parmi un public déchaîné comme on en voit rarement de façon si fréquente et constante, alors on était un peu curieux de voir ça "en vrai". La ferveur épileptique se met en place au bout d'une note et demi. D'un seul coup, la moitié du public se met à bondir sur place, et il ne faut que trente secondes pour que l'autre moitié fasse de même, même chez les vieux os comme moi. Turnstile a une présence scénique incroyable. Ils déclenchent quelque chose de profondément positif, des effluves d'amour dégoulinant de partout. Leur musique fait du bien, un bien fou, et l'heure passe à toute allure, nous laissant essorés et trempés de sueur (ça fait ça l'amour, non ?)


Vidéo pas de moi (j'étais côté gauche)

Viagra Boys

On enquille sans attendre avec les Viagra Boys, qui eux aussi savent donner de l'amour, mais pas tout à fait le même. Ici rien de positif, Sebastian et sa bande sont les rois de la dérision et du cynisme rigolard. Des vrais punks dans l'esprit, trash et destroy mais sans agressivité aucune. On sent bien que les mecs sont contents et qu'ils s'éclatent, et c'est sacrément communicatif. Leur post-punk très groovy réussit à déclencher des circle pit (ce phénomène qui est devenu fréquent lors des concerts de musique "brutale", où le public se met à tourner en rond de façon relativement violente, une sorte de pogo mixé avec une ronde enfantine donc), même comme sur ce délire bruitiste sans la moindre mélodie ni le moindre rythme, juste des sons distordus venant du saxo (dont les mimiques ultra-queer caricaturales font rire tout le monde). Sebastian est déchaîné, il enfile bière sur bière, les recrache et s'en fout partout, joue avec son énorme bide et ses tétons, se marre, se roule par terre (dans la bière renversée, donc), nous propose une espèce de marche titubante qui nous donne l'impression soit qu'il ne tient plus debout à cause de la bière, soit que son corps est tellement détruit qu'il arrive à peine à marcher correctement (il n'a que 33 ans, je me suis renseigné), soit qu'il... le fait exprès, tout cela étant sans doute vrai. Un moment de parfaite jouissance et de bonne humeur donc, pour un groupe qui lui aussi déclenche des torrents d'amour.

Vidéo toujours pas de moi

Flavien Berger / Silly Boy Blue

On commence par quelques titres d'un Flavien Berger pierrot lunaire électro et poète déjanté qui raconte à peu près n'importe quoi et fait, lui aussi, marrer le public, malheureusement un peu seul sur scène avec ses bandes. On apprécie plutôt quand ça bouge un peu que lorsque ça frôle la chansonnette, puis on va voir une autre Française, Silly Boy Blue (un nom tiré d'une chanson de Bowie) qu'on ne connaissait pas, de la pop-rock-indé tendance new-wave gentillette mais efficace et bien foutue, le genre de truc qu'on peut écouter pendant deux heures chez quelqu'un sans que ça nous dérange et même qu'on apprécie, contrairement à de la variétoche insupportable qui donne envie de prendre congé de ses hôtes. La jeune fille saute comme un cabri en permanence, sa gentillesse et son enthousiasme sont communicatifs, bref même si l'on est loin du destroy des groupes précédents, ce n'est pas désagréable : elle nous aime, et nous on l'aime aussi, au moins pour ça.


Pas de bol, pas encore de vidéo de Silly Boy Blue sur YouTube

Pogo Car Crash Control

Il va devenir difficile de parler d'amour ici. Le quatuor français de metal alternatif mâtiné de grunge, quelque part entre l'album Bleach de Nirvana et n'importe quel album de Prong, très début des 90's donc, met le paquet dans les hurlements et les riffs qui écorchent. Ils débordent d'énergie, et leur côté juvénile, très naïf, donne envie d'écouter le morceau suivant à chaque fois, même si leur "vous êtes chauds Rock en Seine" ou "allez on tend tous un doigt" semblent un peu mécaniques, rôdés, pas très spontanés... et surtout un peu ridicules. Pas super chaleureux par rapports aux groupes précédents donc, sans doute trop pros dans leur désir d'assumer - ce qu'ils font à merveille -, mais c'est plutôt réussi pour qui a l'habitude de ce genre de musique évidemment. Mais comme on aime la naïveté, on leur pardonne leur désir de vouloir en faire un peu trop.


Vidéo pas de moi, marrant elles ont toutes été filmées à l'opposé de là où je me trouvais

Fever Ray

Direction Fever Ray maintenant, avec la curiosité de voir si Karin Dreijer (48 ans, je me suis renseigné) et sa bande de filles va offrir un show à l'image de ses pochettes de disques et de tout le visuel étrange et délirant, conceptuel, qu'elle décline à chaque sortie de disque. Son électro bizarre, qui passe de l'étrange expérimental à la techno de rave prend toute son ampleur ici, même si ce n'est pas du tout la même sensation que seul chez soi, grâce aux chorégraphies bizarres (pour elle c'est un adjectif qui revient tout le temps), aux costumes outranciers (costard-cravate blanc pour elle, femme d'affaire et pute pour ses copines qui tiennent la scène), et surtout aux grimaces de la dame qui créent franchement le malaise. Cela avec des infra-basses synthétiques dont vos poumons se souviennent encore (mais ça reste supportable). Elle termine le concert avec la BO de la série Vikings qui a sans doute concouru à la rendre célèbre, "If I Had A Heart", ce qu'on n'attendait pas trop en pensant qu'elle ne ferait rien de ce que l'on attendait, justement, mais on est contents. Ici, l'amour se déclinait aussi, un amour malsain, un peu sale, comme ce qui peut déranger dans le sexe et ses déviances qui fascinent chez les autres mais qu'on n'a pas trop envie d'essayer tout en étant bien tenté parfois.


Vidéo encore pas de moi

Placebo

Restent les stars de la journée à aller voir, Placebo que je vois pour la première fois... et probablement la dernière. Brian Molko a 51 ans (je me suis renseigné), et l'amour qui dégouline autour de moi de la part de fans relativement âgés ne me touche pas trop, même s'il est plutôt sympathique. Il faut dire que je  suis placé bien trop loin de la scène, il y a beaucoup de monde, et que Molko et son bassiste bellâtre à la combinaison de cuir moulante ouverte sur son torse qui m'a toujours énervé et dont je n'arrive jamais à retenir le nom, ne sont pas plus grands que des playmobil, masqués par des tas de grands, eux, dont bon nombre portent le chapeau rouge Firestone qui leur a été offert et qui masque encore plus la vue à ceux qui sont derrière, merci. Gros problème, les écrans géants censés permettre de contourner la distance ne montrent pas les musiciens tels qu'ils sont, car des effets vidéo à la con ont été rajoutés par dessus, "pour faire arty", il faut sans doute dire un peu prétentieux ou carrément boomer (comme le disent les jeunettes qui m'accompagnent, "ça fait tellement 2000"). Eh oui. Musicalement enfin, le set est trop parfait, zéro surprise, je serais dans mon salon en train de regarder des vidéos de Placebo, ça serait pareil. C'est donc bien, car leur musique est bien et qu'elle se suffit à elle-même, mais un concert ? Aucun intérêt. On s'en va juste avant la fin, déçus par le manque de vie et d'amour en provenance du groupe, l'amour provenant du public étant passablement agaçant. On aurait mieux fait d'aller voir Dalle Béton et son génial "49.3, on n'en veut pas". Tant pis, ça sera pour une autre fois !

Voilà à peu près ce que je pouvais voir. Un peu chiant non ?

La suite dans quelques jours pour la journée de dimanche !

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