Chronique de "The Ballad of Darren", de Blur

Blur n'en finit pas de ne plus exister. Après "Magic Whip", l'album du retour en 2015, 12 ans après le dernier "Think Tank" en 2003, voici l'album du retour du retour, 8 ans plus tard. Blur est toujours là, et c'est tant mieux, car les prestations solo de ses divers membres (y compris au sein d'un Gorillaz devenu routinier), bien que sympathiques, laissaient toujours un arrière-goût d'inachevé, de manque de perfection, de ce petit brin de folie qui a toujours existé dans Blur.

Car il faut le rappeler aux plus jeunes : Blur a commencé comme un groupe baggy, ce sous-genre du rock indé né à la fin des années 80 mêlant pop sixties, dance music, psychédélisme et une micro-dose de (post-)punk, avant d'être estampillés britpop, un fourre-tout destiné à évoquer quelques groupes capables d'émoustiller les minettes en mal d'idoles et surtout à rapporter plein de sous à l'industrie du disque, revenue d'entre les morts depuis la fin du grunge et de ses musiciens aux cheveux longs pas assez sexy. D'aucuns s'obstinent depuis à ne voir en Blur que l'aspect jolies mélodies et bluettes calibrées pour les charts, mais c'est une grossière erreur : Blur a toujours concilié la pop la plus kitsch qui soit avec les titres tordus, bizarres, bourrés d'expérimentations sonores, voire parsemés d'éclairs de violence. Et c'est cela leur force : réussir dans tous les cas à ne jamais avoir l'air ridicules ou inaccessibles.

Ceci étant, la vraie question est la suivante : ce nouvel album est-il à la hauteur de ce que l'on a connu, et bien sûr de ce que l'on attend ? Le groupe semble avoir bien compris le message : il ouvre l'album avec The Ballad, une ballade, donc, gentille et sirupeuse à souhait, comme pour nous dire : "on commence par ce que vous vouliez". Puis il enchaîne avec tout à fait autre chose, histoire de nous rappeler "ça, c'est nous aussi" : St Charles Park, c'est leur côté Dr Jekyll, avec ses guitares dissonantes et sales sur lesquelles ils arrivent malgré tout à nous coller des choeurs "comme si c'était une ballade". Ce sera cependant le seul morceau du lot à dénoter du reste. "The Ballad of Darren" lorgne beaucoup plus du côté ballades, qu'elles soient symphoniques (Russian Strings, The Heights) ou seventies (Avalon), acoustiques (The Everglades (For Leonard)) voire electro "à la Pet Shop Boys" (Goodbye Albert). Il y a bien sûr aussi un superbe morceau, le single sorti un peu plus tôt, (The Narcissist).

Au final, un résultat mi-figue mi-raisin : un bon album certes, mais sans réelle surprise ni culot. Les gars ont roulé leur bosse, et ils connaissent la recette, elle est efficace. Le talent est là, les idées aussi, mais on aurait sans doute aimé être un peu plus secoués avec ces dix morceaux étalés sur seulement 35 minutes...

(Chronique également publiée sur premo.fr)



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