Vinyl, épisode 1 : une nouvelle série vraiment rock'n'roll ?


La série était très attendue, et avant même que quiconque ait pu voir le pilote, les avis étaient déjà dithyrambiques. Il faut dire que "Vinyl" (en français, on écrit "vinyle", la réforme de l'orthographe serait-elle passée par là où s'est on-dit qu'il était inutile d'adapter le titre ?) a de quoi séduire : une immersion dans le New-York de 1973, dans le monde interlope du rock et des charognards qui tournent autour (l'industrie du disque, celle qu'adore Pascal Nègre, alors que nous on n'aime vraiment pas Pascal Nègre), au croisement de deux époques : la fin du glam-rock et les débuts du punk, le tout scénarisé par, excusez du peu, Martin Scorsese.

Donc, ça valait le coup d'en parler, même s'il ne s'agit que d'un premier épisode (de près de deux heures et qui pourrait -presque- s'arrêter là, comme un vrai bon long-métrage).

Je tiens d'abord à rappeler aux aimables lecteurs de ma prose qu'en 1973, je jouais encore aux playmobil (enfin aux playbig, à l'époque), et que je me foutais pas mal du rock. Je suis quinquado, pas septantado, hein, donc mon avis ne sera sûrement pas le plus pertinent sur cette époque que je n'ai connue que dix ans plus tard, même si je me suis beaucoup documenté dessus.

Cet épisode, très touffu, évoque plusieurs choses au travers du héros Richie Finestra (excellent Bobby Cannavale, qu'on avait kiffé en mafieux impitoyable et fou à lier dans la géniale série Boardwalk Empire), producteur au bord de la ruine, obligé de flirter avec des tarés pour sauver sa maison de disques.
A travers les regrets de son passé, on assiste au cynisme raciste de l'industrie du disque des années soixante qui méprisait ses artistes pour en faire des objets de profit. Au présent (en 1973), on prend conscience de l'arrivée de "quelque chose", par l'enthousiasme underground pour une nouvelle forme de musique (le proto-punk des New-York Dolls) en train de balayer le hard-rock institué de gens comme Led Zeppelin, et déjà aux prémisses du punk nihiliste via Suicide (juste évoqué, mais ils n'avaient pas de guitares) et le seul groupe fictif de l'histoire, les Nasty Bits. Enfin, Scorsese n'a pas pu s'empêcher de glisser là-dedans son goût pour la mafia et le meurtre, on est d'ailleurs assez surpris qu'il y en ait un (au cours d'une scène hilarante, entre nous), ce qui n'était pas vraiment nécessaire.

Les commentaires que j'aie déjà pu lire à droite à gauche (sur des sites américains) me laissent dubitatif car je m'attendais à un franc enthousiasme, or bon nombre de gens s'offusquent, et en gros disent tous : "c'était pas comme ça à l'époque". Ah, je vois, des puristes ! Il y en aura toujours, mais ce n'est pas le propos.
Certes, une émeute dans les rues pour se rendre au concert des New-York Dolls est très exagéré, certes le nihilisme de Nasty Bits arrive un peu trop en avance, certes les mecs des maisons de disques sont vraiment tous trop cinglés, certes le meurtre au milieu est de trop... mais on s'en fout un peu, non ? Ce n'est pas un documentaire, c'est de la fiction, et dans la fiction tout est raccourci, enjolivé (ou sali), bref on est dans l'entertainment, et force est de constater qu'on est entertainé à donf et qu'on prend vraiment son pied.
On rit beaucoup, on tremble avec eux, mais surtout la grande réussite vient de ce qu'on ressent fortement l'élan libérateur du rock le plus extrême (pour l'époque, depuis on fait bien pire bien sûr, mais la "pureté" de l'époque a rarement été atteinte depuis), et même d'autres formes de musique comme le blues ou la soul. Car Vinyl ne néglige aucune forme de musique, et même si son propos met en avant l'arrivée du punk, celui-ci reste finalement très marginal dans la BO, au profit d'autres musiques plus classiques et toujours d'une grande qualité.

Le résultat : je me lève ce matin, et j'ai une féroce envie de réécouter les New-York Dolls, le MC5, les Stooges, Television ou Patti Smith, sans oublier ceux qu'on oublie régulièrement comme les Dictators, les Electric Eels, Death ou Rocket From The Tombs (ces derniers ayant donné plus tard Pere Ubu, et vous savez quoi, ils viennent de se reformer pour un album génial, si si, tout comme Death, d'ailleurs !)

Alors si vous aimez un tant soit peu le rock qui saigne et qui crache, au sens large (pas Toto ni Dire Straits et encore moins Johnny Halliday), plongez dans Vinyl, et tant pis pour les grincheux qui pensent que la réalité a été embellie.


Le trailer

Et les vrais :



Les Stooges (avec Iggy Pop au chant, of course)




MC5



Electric Eels



Death, le seul (?) groupe proto-punk Noir



Dictators



New-York Dolls (managés par un certain Malcolm Mc Laren,
qui s'occupera plus tard des Sex Pistols !)

1 commentaire:

  1. Excellente fiction dont j'ai découvert les deux premiers épisodes le weekend dernier. La scène avec Peter Grant est hilarante. La baston avec le DJ est une hallu, les mafieux sont merveilleux (l'emprise de la Mafia sur le showbiz américain, ça rappelle quelques jolies scènes du Parrain). Et l'effondrement du Mercer center of Arts est authentique (pas pendant un concert des Dolls). Prometteur!

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